LA
RUPTURE PREMATUREE DES MEMBRANES
Revue de la littérature par Michel Briex.
Physiopathologie de l'accouchement prématuré et de la
rupture prématurée des membranes en relation avec l'infection amniotique:
Pathogenesis of preterm labor and preterm premature rupture of membranes associated
with intraamniotic infection.Gomez R, Romero R, Edwin SS, David C. Infect Dis Clin
North Am 1997 Mar; 11(1):135-176.
Les auteurs proposent ici un modèle dans lequel l'élément déclencheur du travail en
présence d'une l'infection provient de l'hôte.
Les infections maternelles comme une pyélonéphrite ou une amniotite sont susceptibles de
déclencher le travail par leur activation des monocytes et du système macrophagique au
niveau sanguin périphérique et au niveau des membranes. La mise en travail prématurée
(MAP) et la rupture prématurée des membranes (RPM) peuvent selon les auteurs, être
considérés comme des événements qui se produisent lorsque l'environnement est hostile
et menace la mère ou l'enfant; de ce point de vue, la mise en travail prématurée peut
être considérée comme un mécanisme de survie.
Pourquoi l'infection est elle parfois responsable d'accouchements prématurés et dans
d'autres cas d'une RPM? On peut admettre que le type de réponses biologiques de l'hôte
à l'infection à un rôle prépondérant dans la présentation clinique: Si la réponse
de l'hôte se fait plutôt sous la forme de sécrétions de substances utérotoniques
(prostaglandines en particulier) on observe une MAP, dans le cas ou cette réponse
consiste en une sécrétion prédominante de protéases (élastase leucocytaire en
particulier) nous observons une RPM. La MAP comme la RPM peuvent être considérées comme
l'expression du même phénomène: la mise en jeu d'un système de défense de l'hôte par
l'activation de son système macrophagique.
Note de l'auteur : Le travail est sérieux, l'article riche (41 pages)
un peu technique... Même si nous ne doutions plus du rôle de l'infection dans la MAP ou
la RPM, les auteurs ont le mérite d'essayer d'en clarifier les mécanismes (ce qui n'est
pas encore gagné).
ETUDE PROSPECTIVE, RANDOMISEE, EN DOUBLE AVEUGLE AVEC ESSAI CLINIQUE
CONTROLE PORTANT SUR UNE ANTIBIOTHERAPIE CHEZ DES PATIENTES PRESENTANT UNE RUPTURE
PREMATUREE DES MEMBRANES DEJA TRAITEE PAR CORTICOTHERAPIE ANTENATALE.
A prospective, double blind, randomized, controlled
clinical trial of ampicillin-sulbactam for preterm premature rupture of membranes in women
receiving antenatal corticosteroid therapy. Lovett SM, Weiss JD, Diogo MJ, Williams
PT, Garite TJ. Am J Obstet Gynecol 1997 May;176(5): 1030-1038.
Objectif: Le but de l'étude était de tester l'efficacité de
l'antibioprophylaxie chez des femmes présentant une rupture prématurée des membranes
(RPM) et recevant une corticothérapie antenatale.
Protocole de l'étude: Cent douze patientes ont été séparées au hasard et en
double aveugle en trois groupes: (1) Traitement ampicilline-sulbactam (Unacim®) pendant
72 heures suivi d'un traitement par Ampicilline acide clavulanique (Augmentin®), (2)
Ampicilline pendant 72 heures suivi soit par amoxicilline soit par un placebo(3).
Résultats: 48,6% des nouveaux nés du groupe placebo sont décédés, ont
présenté un septis ou une détresse respiratoire sévère contre seulement 29,3% dans le
groupe (2) (p<0,05) et 26,3% dans le groupe (1) (p<0,05). Les trois morts néo
natales sont survenues dans le groupe placebo (p=0,03 versus groupe antibiothérapie). Le
poids moyen à la naissance était supérieur dans le groupe (2) (1773g p=0,04) et dans le
groupe (1) (p=0,02) que dans le groupe placebo (3) (1543g). L'antibioprophylaxie réduit
aussi la durée de ventilation artificielle.
Conclusions: L'antibioprophylaxie associée à la corticothérapie réduit
significativement la mortalité et la morbidité néonatale dans la RPM, elle augmente
aussi le poids de naissance des bébés.
Note de l'auteur: Une étude sérieuse, un travail bien conduit, une série
conséquente (112 RPM). Nous avons tous hésité quelques temps à la prescription
systématique d'antibiotiques dans la RPM de peur de favoriser des infections résistantes
et de grever ainsi le pronostic ftal. De plus en plus d'études (dont celle ci) vont
dans le sens contraire. Les résultats de ce travail vont dans le sens de l'hypothèse de l'article précédent sur certains mécanismes de la MAP et de la RPM
cqfd.
REDUCTION DE LA MORBIDITE NEONATALE APRES RUPTURE PREMATURE DES MEMBRANES.
ETUDE CONTROLEE RANDOMISEE.
Antibiotic therapy for reduction of infant morbidity after preterm rupture of the
membranes. A randomized controlled trial. Mercer BM, Miodovnik M, Thurnau GR,
Goldenberg RL, Das AF, Ramsey RD, Rabello YA, Meis PJ, Moawad AH, Iams JD, Van Dorsten JP,
Paul RH, Bottoms SF, Merenstein G, Thom EA, Roberts JM, Mc Nellis JD. JAMA 1997 Sept
24;278(12):989-995.
L'infection in utero est une des causes prouvée de la rupture prématurée des
membranes (RPM), l'antibiothérapie prolonge la grossesse mais ses effets sur la
morbidité infantile sont moins bien connus.
Objectifs: Déterminer si le traitement antibiotique in utero dans la RPM réduit
la morbidité néonatale.
Méthodologie: Etude randomisée en double aveugle contrôlée contre placebo mise
en uvre par l'University Hospital of the National Institute of Child Health and
Human Development Maternal-Fetal Medicine Units Network pendant une semaine. Ont pu être
retenues 614 patientes parmi les 804 ayant présenté une RPM entre 24 et 32 SA et
considérées comme pouvant continuer leur grossesse et n'ayant pas reçu de maturation
corticoïde. Le traitement consistait en l'administration de 2g d'ampicilline IV toutes
les 6 heures et de 250mg d'Erythromycine toutes les 6 heures pendant 48 heures suivi d'une
association ampicilline Erythromycine per os pendant 5 jours versus traitement placebo.
Les patientes présentant une infection par strptocoque B étaient traitées, aucun
traitement tocolytique et aucune corticothérapie n'ont été administrés pendant la
période de l'étude.
Eléments retenus: Les éléments à court terme étaient les suivants: mort
périnatale, détresse respiratoire, hémorragie intra ventriculaire sévère,
entérocolite nécrosante stade 2 ou 3 ou sepsis dans les 72 heures de vie. La morbidité
périnatale a elle aussi été évaluée ainsi que la poursuite de la grossesse.
Résultats: Sur la population totale les complications à court terme (44,1% versus
52,9%-p=0.04), la détresse respiratoire (40,5% versus 48,7%-p=0.03) et l'entérocolite
nécrosante (2,3% versus 5,8%-p=0,03) étaient moins fréquents sous antibiotiques. Dans
le groupe streptoB négatif, les patientes traitées par antibiotiques avaient moins de
complications immédiates (44,5% versus 54,5%-p=0,03), de détresses respiratoires (40,8%
versus 50,6%-p=0,03), d'infections (8,4% versus 15,6%-p=0,01) et d'autres
complications.Parmi ces femmes non porteuses de strepto B un allogement significatif de la
durée de la grossesse existait sous antibiothérapie (p=0,001).
Conclusions: Les auteurs recommandent que les patientes surveillées pour RPM
bénéficient d'une antibiothérapie pour réduire la morbidité néonatale.
Note de l'auteur: L'étude est puissante portant sur un grand nombre de
patientes suivies simultanément dans plusieurs centres, la démonstration est donc
limpide, continuons
Il faut tout de même limiter les résultats de ce travail au demeurant fort sérieux, et
changer les termes du titre car il s'agit plutôt d'une étude sur l'utilité de
l'antibiothérapie dans la RPM chez des patientes ne portant pas de strepto B.
ACCOUCHEMENT PREMATURE ET RUPTURE PREMATUREE DES MEMBRANES. DIAGNOSTIC ET
PRISE EN CHARGE :
Preterm labour and preterm rupture of the membranes. Diagnosis and management.
Mercer BM, Leweis R. Infect Dis Clin North Am 1997 Mar;11(1):177-201.
L'accouchement prématuré consécutif à la rupture prématurée des membranes est
responsable de la majeure partie de la mortalité et de la morbidité néonatale aux USA.
Les patientes présentant des symptômes faisant craindre une telle situation doivent
bénéficier d'examens permettant d'évaluer la situation, de confirmer le diagnostic et
d'en traiter la cause véritable. La détermination de l'âge gestationnel, du bien être
ftal, et la présence d'une infection intra-utérine sont des étapes cruciales dans
la prise en charge. La corticothérapie est actuellement reconnue de façon certaine comme
capable de réduire la mortalité et la morbidité néonatale et doit être prescrite à
toutes les patientes présentant une MAP et dans la mesure du possible à celles dont la
maturité pulmonaire ftale est absente ou non documentée. Les auteurs recommandent
une prise en charge similaire pour les patientes présentant une rupture prématurée des
membranes (RPM) avant terme mais reconnaissent le manquent d'études qui en prouvent
formellement l'utilité. La tocolyse à la période aiguë offre des résultats non
durables mais qui peut souvent permettre la mise en uvre d'une maturation
corticoïde. Le traitement tocolytique n'est pas dénué de risques maternels et
ftaux et il faudra bien en peser le rapport risque bénéfice attendu avant de le
mettre en uvre: une évaluation de la maturité pulmonaire et du risque d'infection
sont impératifs pour faire le choix d'un tel traitement. L'antibiothérapie ne semble pas
réduire la morbidité maternelle et infantile consécutives à l'accouchement
prématuré, par contre ce traitement semble efficace pour réduire le risque de
chorioamniotite, pour augmenter la durée de la grossesse et semble susceptible de
réduire les infections néo natales et la morbidité liée à la prématurité dans la
RPM. Enfin, les auteurs conseillent une administration d'antibiotiques intrapartum en cas
de menace d'accouchement prématuré ou de RPM prolongée dans toutes les situations ou il
existe la notion d'un streptocoque B mais aussi lorsque cette information n'est pas
connue, ce traitement fait appel à une blactamines
parentérale.
Note de l'auteur : Un rigoureuse mise au point sur le sujet et des
références d'actualité; l'attitude vis à vis du strepto B est intéressante et
pourrait être résumée ainsi: "toute MAP doit être considérée comme consécutive
à un streptocoque B jusqu'à preuve du contraire".
AMNIOINFUSION DANS LA PREVENTION DE L'HYPOPLASIE PULMONAIRE DANS LA RUPTURE
PREMATUREE DES MEMBRANES DU SECOND TRIMESTRE.
Amnioinfusion for prevention of pulmonary hypoplasia in second-trimester rupture of
membranes. Vergagni P, Locatelli A, Strobett N, Cavallone M, Arosio P, Ghidini A. Am J
Perinatol 1997 Jul;14(6):325-329.
Le but de l'étude est d'évaluer la faisabilité et les bénéfices de l'amnioinfusion
transabdominale dans la rupture prématurée des membranes (RPM) du second trimestre avec
oligoamnios sévère. Les auteurs ont comparé un groupe de patientes ayant présenté une
RPM à un terme inférieur ou égal à 25 SA et ayant bénéficié d'amnioinfusions
répétées (n=18) à un groupe témoin suivi précédemment et ayant eu un suivi avec
surveillance simple (n=16). Le diagnostic d'hypoplasie pulmonaire était posé à la
naissance selon des critères cliniques et radiologiques stricts.
Aucune complication de l'amnioinfusion n'a été observée. La prévalence de l'hypoplasie
pulmonaire était significativement moins fréquente chez les patientes ayant bénéficié
d'une amnioinfusion par rapport au groupe contrôle (46%=6/13 versus 86%=12/14) malgré un
âge gestationnel moyen au moment de la RPM inférieur dans le groupe traité. Dans le
sous groupe où le liquide d'amnioinfusion était rapidement évacué, le pronostic était
moins bon que pour les femmes chez qui l'oligoamnios avait pu être contrôlé pour au
moins 48heures (0/4 versus 6/9). Les patientes pour lesquelles l'amnioinfusion est
efficace ont en général un intervalle plus long entre la RPM et la survenue d'un
oligoamnios que les patientes chez lesquelles l'apparition de l'oligoamnios était plus
rapide. Ces éléments semblent montrer que la vitesse de perte du liquide amniotique dans
la RPM est un facteur prédictif de la perte du liquide d'amnioinfusion et permet de
déterminer quelles patientes tireront le plus grand bénéfice de cette technique.
Note de l'auteur : L'amnioinfusion est une méthode très utilisée au
USA mais la plupart des articles sur le sujet concerne l'amnioinfusion pendant le travail,
pour une fois qu'un article vient d'Europe
La technique est de réalisation simple et
le mérite de ce travail est d'avoir essayé de déterminer quelles patientes tireraient
le plus grand bénéfice de ce traitement apparemment facile à mettre en uvre (sous couvert d'une antibiothérapie of course)
RUPTURE PREMATUREE DES MEMBRANES: ETUDE RANDOMISEE SURVEILLANCE
HOSPITALIERE VERSUS SUIVI A DOMICILE.
Preterm premature rupture of membranes: a randomized study of home versus hospital
management. Carlan SJ, O'Brien WF, Parsons MT, Lense JJ. Obstet Gynecol 1993
Jan;81(1):61-64.
Objectifs: Comparer la durée de la période de latence, l'âge gestationnel à
l'accouchement et la sécurité chez des patientes sélectionnées présentant une rupture
prématurée des membranes (RPM) choisies au hasard pour un suivi soit à domicile soit en
hospitalisation.
Méthodes: En fonction de critères d'inclusion stricts, 67 patientes ont été
sélectionnées au hasard pour être suivies soit à domicile soit à l'hopital.Les deux
groupes étaient pris en charge de façon semblable avec repos au lit. La surveillance
consistait en une prise de température toutes les six heures, un compte des mouvements
ftaux, ERCF et bilan sanguin deux fois par semaine, échographie hebdomadaire et
examen clinique du col.
Résultats: Il n'y a aucune différence significative entre les caractéristiques
périnatales et le devenir immédiat dans les deux groupes. Toutefois il a été noté
dans le groupe suivi à la maison une diminution de la durée d'hospitalisation de des
dépenses médicales.
Conclusion: Pour un petit nombre de cas la RPM (18%) peut être prise en charge dans des
conditions de sécurité satisfaisantes si l'on retient les critères de cette étude.
Dans le groupe suivi à la maison, la période de latence et l'âge gestationnel à
l'accouchement n'étaient pas significativement différents.
Note de l'auteur: On peut le faire
En plus ça fait des économies. En
France il y a malheureusement assez peu de régions où l'organisation du réseau de
santé permet une surveillance à domicile aussi serrée et dans de bonnes conditions de
sécurité(tout le monde n'a pas l'HAD); si le risque est effectivement le même il ne
nous restera alors qu'à convaincre les 18% de patientes.
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